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Retranscription du Tuyau, numéro 12, page 8 (30 septembre 1915)

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Provinciale

Les essais d'aclimatation d'animaux divers au Camp de Quedlinburg, ?- sont véritablement difficiles. Mort après deux mois de captivité le corbeau du 1er Camp qui triste et songeur ?au front! Mort les vers à soie avant d'avoir filé leurs gracieux cocons, morts aussi les intéressants ? dont j'ai précédemment entretenue les lecteurs du Tuyau! Et voici que nous parvient une triste nouvelle: ladisparition du hérisson de la baraque 10B. Depuis le jour dejà lointain où il avait été capturé tout jeune par un adroit cuisinier, il avait paru s'apprivoiser et presque se plaire dans la société des hommes. Il n'était plus sauvage, recherchait moins les coins et au lieu de se mettre en boule et de darder ses piques au grand dommage des mains qui le touchaient, il abaissait aimablement ses aiguilles le long du corps et se laissant gentiment caresser. Il est vrai qu'on l'entourait de soins attentifs, nul morceau n'était trop bon pour lui et quand il semblait fatigué de grignoter, on le faisait têter au biberon du lait sucré! Hélas! Pris d'insomnie, il s'ennuya une nuit dans sa caisse souillette et pour se dégourdir les jambes s'en vint trottiner sans penser à mal sur la figure d'un sympathique sergent-major. Celui-ci réveillé en sursaut, saisit le visiteur indésirable et dans l'obscurité le lança d'une main involontaire mais sûre sur la tête d'un doucheur qui dormait du sommeil du juste, mais en sortit un peu brusquement.
Prenan à son tour l'intru, le dit doucheur lui fit décrire dans l'air une vaste parabole que ne se termina qu'au point d'intersection avec le nez d'un Russe.
Celui-ci ne trouva pas de son goût cette fatalité mathématique et dirigea un peu violemment l'animal voyageur vers la porte d'entrée. Celle-ci était entr'ouverte et le hérisson prit-il la clé des champs? Fut-il l'objet d'un acte de materiallisme commis à la faveur des ténèbres? On ne le saura sans doute jamais. C'est ainsi qu'un fait divers vient clore ? une touchante idylle!

J'ai parlé ci-dessus des parasites. Nous les avons tous plus ou moins ?, nous nous en serions volontiers passés et nous ne demandons pas mieux que de romple complètement les relations avec ses fichues bestioles. Aussi avons-nous suivi d'un oeil intéressé les progèrs incessants qu'on fait les machines à désinfecter du camp. Celles-ci ont été jugées ces temps-ci suffisamment au point pour être l'objet de visites par groupes des sentinelles du camp sous la conduite des docteurs des bains-douches qui leur font à cette occasion un petit cours conférence. Je n'ai pas eu l'honneur d'y assister, mais j'au pu en avoir quelques échos. Je ne puis résister au plaisir de vous en faire part. Voici: De tous les parasites les plus désagréables sont indéniablement les poux. Il y a trois sortes de poux dont les oeufs mêmeprésentent des différences visibles. 1° le pou de tête (Klopflaus) 2° le morpion (Filzlaus) 3° le pou de corps (en allemand Kleiderhaus mot à mot pour de vêtements). On évite facilement le premier en se tenant les cheveux ras et en se lavant la tête fréquemment, comme le fait d'ailleurs en tout temps quiconque est propre. Le deuxième ne résiste pas l'onguent gris, un moyen préventif (et radical) contre cette variété consiste à se débarrasser de tous les poils du bas ventre soit au moyen de la tondeuse ou du rasoir, sont en faisant appel à une pommade épilatoire. Certains de nos camarades qui sont allés travailler hors du camp ont pu apprécier, me suis-je laissé dire, l'efficacité de la pommade de ce genre adoptée à l'infirmerie. Ils n'en ont pas été plus fiers pour cela. Le troisième pou est des trois le plus dangereux: il véhiculesouvent le microbe du Flecktyphus et c'est même le seul véhicule de ce microbe meurtrier. C'est aussi le plus tenace, ses oeufs sont généralement attachés le long des coutures surtout quand il s'agit de grosses étoffes. On n'est pas sûr de s'en débarrasser en brossant et battant ses vêtements. L'animal lui-même est difficile à chasser par ce moyen; sa peau est si dure qu'il supporte aisément une pression où une blessure. Il est très prolifique. Le développement des oeufs demande, selon la température de 5 à 17 jours. C'est seulement quand la température tombe au voisinage de 0° qu'ils n'éclosent plus. Le Kleiderlaus supporte longtemps le frois, même un frois de -12° ne le tue pas. Pour s'en débarrasser on a recours à la grande chaleur sèche ou humide. La vapeur sèche le tue en une heure à 45°. En augmentant la température on diminue le temps nécessaire pour le tuer. C'est ainsi que 15 à 20 minutes suffisent à 80° et 10 m à 100°. Les nouvelles machines du camp sont à vapeur sèche et réalisent facilement 100°, elles ont léavantage d'assurer un service rapide et d'abîmer beaucoup moins les effets. Mais assez sur ce sujet, cela me donne des démangeaisons.
L Vacherot


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