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Retranscription du Tuyau, numéro 1, page 5 (15 juillet 1915)
La vie officielle
Notes de la semaine
L'évent sensationnel est confirmé, le Général nous quitte. Nous n'avons plus qu'à souhaiter que son successeur s'adapte rapidement à notre caractère, à nos habitudes et nous témoigne sa satisfaction en élargissant nos (censure). Le Tuyau annoncera à ses lecteurs sa nomination par Extrablatt. Nouvelle preuve de l'intérêt que l'on porte à nos gradés et à nos camarades russes. Un service de surveillance aux latrines a été créé à leur intention. "Empêcher la dégradation de l'édifice et éviter que l'on jette des matières dures dans les fosses", telle est la consigne. Entré libre au fumoir bien entendu. Une bonne nouvelle pour ceux de nos lecteurs qui sont occasionnellement de planton aux fontaines? Le surveillant général que nous ne désignerons pas autrement, est appelé à d'autres fonctions qui lui permettront de mieux employer son autorité fébrile et délirante. Regrets superflus! En dernière heure nous apprenons qu'une commission de surveillants aux douches a été réunie par les Autorités militaires allemandes afin d'assister aux essais d'un nouveau moyen de désinfection (Rayon poux et divers) essais qui du reste furent concluants. Ils ont lieu sur le théâtre même des exploits principaux de ces parasites, c'est-à-dire en Pologne. La mise en pratique à notre camp est imminente. A l'occasion de notre fête nationale du 14 juillet, le groupe Musical et un groupement sportif formé par d'actives bonnes volontés ont émis l'idée de pouvoir organiser des concerts, jeux et sports demandant en même temps une exemption de corvée pour les Français. Ils nous ont chargés de prier l'adjudant Artola en sa qualité de plus ancien gradé du camp d'être leur interprète, chose qui fut faite avec beaucoup d'empressement. Nous tiendrons nos lecteurs au courant. H. Jacob
Notre musique
Un orchestre? Charme pour des captifs! Quelle imagination féconde eut osé rêver la possibilité d'une telle récréation en septembre dernier lorsque, (censure) exténués, malades, nous arrivâmes au Camp des prisonniers. C'est aujourd'hui la réalité! Dès l'autorisation obtenue de nos gardiens, un comité se forma, son premier devoir fut de se procurer des fonds. Les sommes rapidement récoltées prouvèrent l'enthousiasme du public. Les exécutants, pour leur part s'infligèrent de gros sacrifices, ceux-ci ont permis la formation d'un orchestre satisfaisant. Pourtant les choses traînent et l'on dit que le public s'impatiente! Il a tort. S'il a fait beaucoup pour nous, n'avons-nous pas fait autant pour lui permettre d'attendre la date du premier concert. Les auditions musicales du dimanche ne lui suffisent pas. Il veut plus, il est très exigeant; cela est bon signe, c'est qu'il s'intéresse à "notre musique", celle du camp, l'oeuvre de tous. Il veut assister à la moindre de nos répétitions. Cela est hélas impossible. Nous ne pouvons lui donner satisfaction, autant pour la bonne exécution des auditions actuelles que pour celle des concerts futurs. A l'heure actuelle, nous manquons de partitions. Nous en attendons beaucoup de France. Nous en avons commandé en Allemagne, elles ne viennent pas. C'est long et nous en sommes les premiers privés. Nous ne restons pas pourtant dans l'inactivité. Grâce au zèle de notre distingué contre bassiste, Mr L. Kircher qui, de mémoire ou à l'aide de médiocres documents, a adapté pour "notre musique" presque tous les morceaux exécutés jusqu'à présent. Des dévouements plus obscurs, mais non moins appréciables complètent l'oeuvre entreprise et aucun exécutant ne se refuse à copier et à transposer même après les longues heures de labeur individuel et de répétitions. Lorsque nos lecteurs, qui ne peuvent dans la salle de répétition, liront ces détails, ils comprendront qu'il est inadmissible d'exiger de nous plus d'une heure de musique par semaine. Il est matériellement impossible que nous fassions plus. Comme nous ils se résigneront et attendront. Le temps heureux des concerts ne peut plus tarder. Un instrument vient d'arriver de France, c'est le premier et son propriétaire, le hautboïste renommé M.Marson, prix du conservatoire, s'est fait entendre dès le lendemain au cours de la répétition générale du Grand Concert populaire annoncé pour la fête Nationale de 14 juillet. Ce concert hors série précédera de peu, nous l'espérons le Grand concert d'inauguration. Celui-ci est encore différé par suite du départ annoncé des brancardiers. Des commandes de musique et d'instruments ont été suspendues, causant ainsi un nouveau retard d'une semaine au moins. Nous attendons incessamment de nouveaux instruments. L'arrivée du trombone à coulisses est imminente. Le fournisseur nous apprend qu'il est au polissage! L'impatience est maintenant fébrile. A bientôt donc pour le premier concert; une grande assistance nous encouragera! E.L. Chatenet
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