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Retranscription du Tuyau, numéro 9, page 5 (9 septembre 1915)

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Notes Musicales

Les concerts du dimanche 29 août ont donné la preuve des progrès faits par l'orchestre du 1er camp, depuis son premier concert. Plusieurs morceaux entendus dimanche avaient déjà figuré au programme de ce concert.
La petite pastorale "Aube sous bois" de Mr Fourdrain est pleine de fraicheur et de délicatesse.
"Bohème Joyeuse" est gaie. L'air de ballet "Fifres et Tambours" a été bien exécuté. Il a beaucoup plus, comme en général toute la musique de M. E.Gilleli.
L'impressionnante Elegie de Filippud "Doloroso" a fait certainement frémir les coeurs les plus endurcis. C'est une de ces oeuvres dont la musique émeut, même exécutée avec imperfection. L'on se sent vibrer devant une telle éclosion d'art, on est transporté par les accents passionnés de cette belle-oeuvre. Le compositeur n'a pas obtenu un maximum d'effetn il a rendu en musique dans ce langage immateriel de la société - l'expression d'une douleur profonde et vraie.
L'exécution de Doloroso a été bien meilleure que lors du 1er Concert. Elle manquait, encore de grandeur calme. Il faut comprendre dans cette oeuvre l'influence italienne qui caractérisent l'extase, la langueur, l'impétuosité violente mais brève et surtout l'initulité de l'effort.
J'aime cette musique vivante, par instant presque farouche, basée seulement sur l'impression et dont l'orchestration présente une simplification à la fois naïve et puissante.
Le programme du concert était complété par une marche assez intéressante et par la valse mélodique de Mezzacapo "Sympathie" qui dans le genre, est un médiocre spécimen.
Intérim

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Le mystère de la femme au Poignard (2)
Chapitre II - La pendule sanglante

Aubemont pendant ce temps était revenu rapidement chez lui. Il regrettait maintenant la peine qu'il allait causer à sa femme en rentrant une fois de plus à une heure tardive. Joseph Aubemont avait fait, il y avait maintenant 3 ans un mariage d'amour et il n'avait pas cessé d'aimer sa femme, seulement il aimait aussi les plaisirs... de toutes sortes et il ne savait pas leur résister. Il lui arrivait souvent de rentrer ainsi tard, trop tard, ou même parfois de ne pas rentrer du tout, mais s'était chaque fois avec de nouveaux remords.
Il entrait maintenant à pas de loup dans son appartement, il allait falloir tacher d'amadouer la mauvaise humeur au reste bien explicable, qu'allait manifester sa chère Gilberte et Aubemont se sentait ce soir à court d'argument.
Au moment d'ouvrir la porte de leur chambre il hésitait ne valait-il pas mieux remettre au lendemain la scène, oh! pas bien violente mais si pénible pour lui, et coucher comme il l'avait déjà fait tant de fois, sur le canapé de son cabinet de travail?
Il se résolut à ce dernier parti. Il pénétra dans son bureau, alluma la lampe. Il se sentait plus tranquille maintenant, il prit une cigarette et s'assit devant sa table. Il trouva là son courrier de la journée (il n'était pas rentré chez lui avant dîner) et déchira distraitement les bandes des périodiques et des catalogues qu'il avait reçus.
Entre deux publications une lettre pour lui avait glissé avant de l'ouvrir il la contempla un moment assez surpris. Il en recevait généralement peu dont il ne disernat pas immédiatement la provenance, sauf les enveloppes imprimées contenant des prospectus ou des circulaires, il reconnaissait généralement les écritures familières des amis, toujours les mêmes, qui lui écrivaient. peut-être quand même était-ce encore quelque réclame qu'il allait trouver dans cette enveloppe; cela l'étonnait pourtant, elle n'était pas banale cette écriture inconnue, assez fine et peut-être féminine.
Il regarda le timbre de la poste, cherchant de quel quartier elle puvait venir, peu pressé d'avoir le mot de cette petite enigme. La lettre venait de Paris XVIe arrt place Chopin. Il ne connaissait personne à Passy, il ne trouvait décidément pas.
Il déchira l'enveloppe. Elle contenait ces mots étranges écrits de la même petite écriture fine: "Parmis ceux en qui tu as confiance il en est qui te veulent du mal. Crains surtout le Professeur, il est capable de tout. Si tu es demain mardi à 6 heures du soir dans le petit débit de la rue de l'Hirondelle tu y seras éclairci sur bien des choses. Z-47.
Aubemont fronça le sourcil et resta un moment à contempler la lettre, si l'écriture lui était inconnue et si le texte lui semblait étrange, la signature Z 47 lui rappelait d'ennuyeux souvenirs. Il se souvenait: 3 ans plutôt, au moment de son mariage, plusieurs lettres de menaces leur avaient été adressées à lui et à sa fiancée sous cette même signature bizarre. Ils avaient cru à quelque mauvaise plaisanterie, mais l'impression avait pourtant été pénible. D'ailleurs ces vagues menaces n'avaient été suivies d'aucune exécution. La même gêne lui revenait maintenant que cela recommencait. Il relisait la lettre, hésitant avant de la jeter au feu. Fallait-il aller le lendemain à ce curieux rendez-vous? Et si ce n'était qu'une mystification, donnerait-il au mauvais plaisant la joie de le voir se déranger.
En réfléchissant il releva machinalement la tête et fixa inconsciemment la pendule qui était sur la cheminée: elle marquait 8 heures. Impossible, il n'était pas encore cette heure-là, il n'y avait pas si longtemps que, quittant Renard il avait regardé sa montre qui marquait à peine deux heures. Il la sortit à nouveau, il était 3 heures 35. Pourtant la pendule marchait bien la veille, quelqu'un l'avait-il avancée ?
Il se leva et alla regarder de plus près sur le cadran il y avait une petite traînée rougeâtre avec des traces de doigts.
Une main sanglante avait avancé la pendule!
(A suivre)
Les six


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