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Retranscription du Tuyau, numéro 19, page 1 (18 novembre 1915)

Le N°10 Pf. - 18 novembre 1915. N°19

LE TUYAU

Organe indépendant des Prisonniers de Quedlinburg.

Rédacteur en Chef: J.Monjour

Rédaction Administration Baraque 6.A

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Quelques considérations sur la patience

C'était avant la guerre une toute petite vertu sans grand prestige, passablement méconnue et à laquelle personne ne songeait à tresser des couronnes ni à élever des temples. Quand ils avaient à la célébrer, les écrivains ne faisaient pas pour elle de grands frais de rhétorique. La "Patience" était une vertu de second plan, son éloge tenait en quelques lignes simples et discrètes, nul ne prévoyait alors sa brillante destinée, ni son ascension au rang de ces vertus qui font l'orgueil d'un peuple et qu'il grave, en lettres d'or, pour l'enseignement de sa postérité sur les façades des arcs de triomphe ou sur les stèles des monuments commémorant ses victoires!
Sans doute, dès l'école, on nous a enseigné la patience; elle figurait alors au rang modeste des vertus domestiques qu'il était nécessaire d'acquérir pour approcher le type idéal du parfait citoyen. De la même façon dont on nous invitait à mépriser la colère, l'envie ou l'orgueil, c'est-à-dire par pur acquit de conscience, sans beaucoup de conviction et sans se faire illusion sur les résultats de la tentative, on nous exhortait à la patience. Des moralistes austères ont sur ce même sujet rédigé à l'usage de la jeunesse des sentences froides et rébarbatives, comme des formules mathématiques! Ils ont franchement perdu leur temps! D'autres qui avaient une meilleure manière ont tenté, à l'aide d'exemples judicieusement choisis de nous démontrer qu'avec de la Patience on arrivait souvent à résoudre des difficultés que l'on n'eut pas espéré surmonter sans elle. Nous avons encore tous présente à la mémoire la fable de "la Fontaine" qui met aux prises un lion et un rat et dont la moralité "Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage" offre à nos méditations un thème de circonstance.
Malheureusement les efforts des moralistes pas plus que ceux de nos éducateurs, en vue de corriger ou d'atténuer nos vices originales bien que fort louables en eux-mêmes restent presque régulièrement stériles tant qu'aux résultats. Il est infiniment plus aisé de vivre avec ses défauts que de vouloir les combattre. Puis même avec toute notre bonne volonté est-il bien sur que nous arrivions jamais à les effacer complètement. Un écrivain du XVIIIème siècle, qui celui-là n'avait aucune prétention au titre de moraliste n'a-t-il pas quelque part, prononcé cette sentence susceptible de décourager les mieux intentionnés: "Chassez le naturel il revient au galop"!
A coté des vertus et des défauts, qui nous sont échus à notre naissance en une inégale répartition, il en est d'autres aux plus grandes lignes qui sont, comme la caractéristique de notre race. Nous avons des qualités et des défauts qui nous différencient d'avec les autres peuples, qui sont comme la


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