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Retranscription du Tuyau, numéro 5, page 2 (12 août 1915)

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Avec sa probité habituelle, il voulut se mettre en état de juger par lui-même des êtres et des choses et il se perfectionna dans l'étude de la langue allemande. Pendant quelques mois, il fût le secrétaire de Bernstein qui l'initia alors au fonctionnement des organisations ouvrières. C'était l'époque où la Social Démocratie était citée en exemple aux socialistes français!
En 1903 Thomas revenait en France. Dès cette époque, il se mit à faire de la politique. Tout en dirigeant les études de l'arrière-petit-fils de Victor-Hugo, dont l'éducation lui avait été momentanément confiée, tout en préparant sa thèse de doctorat sur Caüs Gracétus Babouy, il collaborait à l'"Humanité", et dirigeait la "Revue syndicaliste de Benoit-Malon. E, 1908 il se présentait au Conseil Municipal à Champigny où il était élu, grâce à la popularité dont jouissais son père. Battu la même année au Conseil général, il passait en 1910, et en 1914 contre Adolphe Chéron, la 1ère fois péniblement, la 2e avec une grosse majorité.
Le "Tuyau" n'étant pas un organe politique, nous ne le suivrons pas dans cette partie de sa carrière. Bornons-nous à dire qu'il s'est fait apprécier même de ses adversaires par son honnêteté et sa puissance de travail. Il a été membre de la Commission du budget, puis rapporteur de la même commission.
Dans la première partie de mon article, j'ai dit les raisons qui avaient fait choisir Thomas pour le poste qu'il occupe aujourd'hui, dans la seconde j'ai esquissé sa rapide carrière !
Je m'arrêterai là, Thomas appartient désormais à l'histoire! Le deuxième chapître de sa biographie commence avec la guerre elle-même.
J.Monjour

Propos d'un prisonnier
Aux douche là-dedans

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Une fois par semaine la consigne est de se laver, on envoie les prisonniers "au bain". La corvée journalière fait place à la petite guerre aux parasites qui forment la suite des armées en captivité comme en campagne. Petites puces à la tournure de demoiselles, mondowoschki aux charmes si prenants, poux guerriers étoilés de noir, assurez vos derrières. "On va doucher!"
La devise "Rien dans les poches" est de rigueur, aussi le divertissement nautique lui-même est-il précédé de la recherche d'un coffre-fort. A défaut de grands établissements de Moratorium, vous choisissez un camarade sérieux, de préférence âgé, marié, père de famille. Vous lui collez pêle-mêle, montre, portefeuille, porte-monnaie, en un mot toute votre fortune. J'ai pour ma part depuis près d'un an un coffre universitaire qui me donne toute satisfaction.
Vous avez aussitôt à vous préoccuper du choix d'un déshabillé galant. Sur ce chapitre les modes les plus audacieuses se sont fait jour. Tant et si bien que de peur du "Poilu à la ?", nos gardiens ont dû intervenir et nous imposer comme programme minimum le port du pantalon.. De façon générale la chaussette est abandonnée, la chaussure fait place à la sandale basque, le Képi a presque entièrement disparu. Par contre la question de la chemise est des plus discutées. Pour moi il suffit de rappeler que l'homme heureux n'ayant pas de chemise, le prisonnier de guerre a tous les droits à conserver la sienne, y compris celui à la faire roussir.
Peu à peu artistement drapé de couvertures blanches ou brunes, la gent court-vêtu se rassemble devant la baraque. On fait l'appel et en route.
Déjà là-bas, au delà des grilles du 1er Camp, c'est un grondement sourd, évocateur des champs de bataille anciens. Le bruit se précise, il devient effrayant, nous approchons.
Et voici le petit enclos où nous poireautons béâtement sous le soleil.
Deux heures plus tard nous sommes dans le temple. La salle est comble, le spectacle en vaut la peine. Sous les pommes d'arrosoir de cuivre, Russes et Français, gros et maigres, hommes de chambre et Chefs de Baraque pataugent fraternellement. Des sportifs continuent leurs mouvements rituels. Des batailleurs se marquent la peau d'empreintes roses à faire rêver M Bertillon tandis que des infortunés dont le savon s'est trotté sous la grille de bois, donnent des poses plastiques d'une originalité savoureuse.
Mais le jet devient froid, c'est fini! A huitaine.
H. Saussier

Souvenir

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Une lettre anonyme a été déposée sur le bureau du "Tuyau". Nous n'acceptons pas ce genre de correspondance.

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Décédé à l'hopital, le 30 Juillet 1915
Vivier, Marcel - civil - né à Guny (Aisne)
le 2 Février 1896.


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