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Retranscription du Tuyau, numéro 5, page 5 (12 août 1915)

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Chronique sportive
Amis, soyons forts ! (suite)

Notre premier article sur la culture physique nus a vallu la lettre suivante que nous nous faisons un plaisir de reproduire, d'abord parce qu'elle complète heureusement notre pensée sur une sujet que, dans une étude d'assez courte haleine, nous n'avons pas cru devoir envisager sous ses divers et multiples aspects, et aussi parce qu'en termes d'une éloquente simplicité, elle accable ce grand ennemi de la culture individuelle, dont nous avons déjà commencé à faire le procès, à savoir le manque de volonté.

Monsieur
J'ai lu votre article dans le "Tuyau" du 5 avec le plus grand intérêt et j'applaudis à cette heureuse inspiration d'une campagne de vulgarisation de la "Culture physique" qui ne pourrait être que d'un grand profit pour tous nos camarades prisonniers lecteurs du "Tuyau".
Mais souffrez que l'un de vos doyens dans la carrière sportive, un vieux, se permette de vous exprimer son étonnement d'une restriction qui lui parait quelque peu fâcheuse. Vous dites: "Or, si parmi les ouvriers à la ville comme à la campagne beaucoup de par l'objet même de leurs travaux fort naturellement de la culture physique et peuvent à bon droit, se dispenser de tout entrainement supplémentaire..."
Vous savez, comme moi que surtout à cette époque de spécialisation à outrance, il n'est pas ou presque pas de travailleurs à quelque catégorie qu'ils appartiennent (ouvrier de l'industrie, de l'agriculture, boxeur ou acrobate) qui puissent se vanter d'exercer tous leurs muscles, qu'en général, chacun se dert d'un, de deux ou de trois groupes musculaires d'un bout de l'année à l'autre, que cette répétition des mêmes exercices amène ches beaucoup l'hypertrophie de certains muscles au grand dam de la plupart des autres plus ou moins en état d'atrophie et incapables de rendre de réels services comme les ressorts rouillés et détrempés.
D'où à mon avis utilité pour ceux-là aussi bien que pour les autres d'une culture physique rationnelle tendant 1°Au point de vue myologique à contre balancer les effets d'un effort toujours le même.
2°A l'entretien et au parfait fonctionnement des plus importants organes internes, poumons, coeurs, foie et reins.
Je crois et vous êtes surement de mon avis, que nul ne peut se targuer de pouvoir se dispenser de sa propre culture tant physique qu'intellectuelle mais même si cela n'était pas, il ne faudrait pas le dire, pour ne pas créer une excuse aux défaillances de volonté qui trop fréquemment sont la véritable cause de la veulerie physique en laquelle se complaisent en dehors des efforts indispensables, nombre de nos contemporains.
Je me suis cru permis en raison de mon ancienneté dans la carrière de vous donner mon avis, j'espère que vous ne m'en voudrez pas de l'avoir fait peut-être un peu trop franchement et je vous prie d'agréer mes cordiales salutations.
Lieutenant A.Bouillon
Ancien adjudant professeur de culture physique au Prytané militaire de la Flèche.

Etant donc bien établi que la seule volonté vaut parce qu'elle est concrète, tous les stimulants moraux auxquels en la matière on pourrait avoir recours, nous allons montrer maintenant que pour toute personne résolue, il n'existe pour ainsi dire, aucun empêchement matériel de nature à refroidir ses bonnes intentions.
Nous avons déjà dit qu'on ne pouvait décemment invoquer la question de temps. La pratique de cette science qui, sans heurts, sans bouleversement, peut et doit cependant métamorphoser l'espèce, ne demande, en effet, par jour qu'un quart d'heure environ. Le matin au réveil ou, en tous cas, deux heures avant ou après les repas, suivant les convenances, quinze minutes d'effort convaincront vite ceux qui auront le courage de les produire, qu'elles portent en elles-mêmes leur récompense. Quelques ablutions à l'eau froide seront une heureuse conclusion à cet exercice.
Quant à la question pécuniaire, elle n'existe pas davantage. Une paire d'haltères que l'on peut très bien fabriquer soi-même à la rigueur, représente le matériel le plus utile, le principal accessoire demeurant toujours l'énergie que chacun possède en soi latente à plus ou moins haute dose. C'est de cette énergie, soutenue et méthodiquement transformée que doivent sortir le bien être physique et à sa suite l'équilibre moral sans lesquels on ne peut prétendre aux belles choses et qui par cela même, font les fortes races et les grandes nations.
G.G.J.


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